La crise immobilière chinoise risque-t-elle de contaminer le reste du monde ?

Evergrande, ce nom n’est pas celui d’un navire mais d’un grand groupe immobilier chinois actuellement dans la tourmente. Cette société a eu, durant des années, un business florissant grâce à un immobilier en plein boom dans l’Empire du Milieu. Le système était des plus classiques, le secteur immobilier levait des fonds en empruntant aux banques, en émettant des obligations puis en revendant des logements flambant neufs aux acheteurs.

Si ce mode de fonctionnement est on ne peut plus classique, les Chinois ont eu quelque peu la main lourde et ont emprunté plus que de raison. A trop emprunter, les promoteurs chinois ont donc pris un énorme risque puisque le moindre ralentissement des ventes de biens pouvait à tout moment affecter durablement les entreprises concernées. Avec une telle dépendance, le danger était devenu très important, l’immobilier chinois a voulu monter vite et de manière irraisonnée.

Excès de zèle ou de confiance, toujours est-il que les promoteurs chinois ont joué sur le fait que la croissance économique du pays devait un tiers de celle-ci au secteur de l’immobilier. A titre comparatif, M. Garcia-Herrero dans un récent article de la BBC évoque le marché boursier américain qui n’a que 5% de ses actifs provenant de l’immobilier, tandis qu’en Chine celui-ci atteint 20%, un chiffre très élevé qui révèle bien cette saturation du marché chinois dans ce secteur.

A la vue des crises successives et toujours d’actualité, les agents économiques se sont murés dans un attentisme visible un peu partout dans le monde. Et l’immobilier chinois n’est pas en reste. Entre prudence et manque de fonds, les acheteurs se font plus rares et les promoteurs font la moue. Il faut dire qu’en Chine, posséder un bien immobilier est une condition prérequise pour un mariage, cette tradition culturelle a donc bien profité aux promoteurs qui s’en sont donnés à coeur joie, mais la fête semble désormais terminée.

Ainsi, Evergrande n’est pas le seul à être impacté. Son concurrent Country Garden a récemment annoncé une perte de 6,7 milliards de dollars sur le premier semestre, du jamais vu !

Les Chinois, face à la crise, font fi des traditions culturelles liées au mariage, ils préfèrent vivre correctement que s’endetter inutilement et ce basculement des mentalités met à mal tout le secteur initialement florissant de l’immobilier.

Mais alors cette crise immobilière risque-t-elle d’impacter le reste du monde ? Un risque de contamination systémique est-il possible ? Là encore les spécialistes sont partagés. Si le ralentissement de la croissance chinoise est visible et semble parti pour durer (chômage des jeunes à à 20%, baisse des exportations de 14,5% et des importations de 12,4% selon la BBC), cela aura forcément un impact ailleurs dans le monde puisque la Chine est l’un des principaux moteurs économiques de la mondialisation.

Depuis la crise sanitaire toutefois, les stratégies des acteurs économiques et des États ont évolué pour tendre à moins dépendre d’un seul pays. Ils se sont tournés vers d’autres pays asiatiques, des pays orientaux ou sont revenus à des ressources plus locales. Malgré tout, certains estiment que la baisse de la croissance chinoise, dont la crise de l’immobilier est une des causes principales, pourrait entraîner une baisse d’environ 3% dans les économies dites développées, et de 6% dans celles considérées comme émergentes (et souvent assujetties à de forts investissements chinois qui plus est, en particulier aux partenaires de la Belt and Road Initiative, anciennement appelée Nouvelles Routes de la Soie).

Si certains y voient le spectre de Lehman Brothers en 2008, une des plus grosses banques d’investissement américaine qui a coulé en un quelques heures créant ainsi la tristement célèbre crise des subprimes, la Chine semble toutefois plus en capacité de limiter les dégâts. En effet, le gouvernement chinois avait déjà émis le souhait de réduire son secteur immobilier, voyant dans le logement quelque chose pour vivre et non pour spéculer. Cette mentalité, très différente du capitalisme américain, pourrait ainsi avoir des conséquences bénéfiques avec un ralentissement de l’inflation qui irait de pair avec une baisse des prix.

Pour l’heure, de nombreux acheteurs se retrouvent ainsi pénalisés avec des biens achetés sur plan qui n’ont pas pu démarrer ou être terminés faute d’acheteurs suffisants. Une crise désormais sociale où les victimes en vont jusqu’à dormir dans les halls des banques pour obtenir gain de cause. Nous assistons également à des manifestations qui, dans un état Chinois farouchement opposé à ce genre de choses, font mouche et obtiennent le soutien du gouvernement, lequel affirme que les travaux vont reprendre.

Une situation peu reluisante mais qui reflète bien la crise économique actuelle qui touche finalement l’ensemble des secteurs de l’immobilier et du BTP, lesquels tentent peu à peu de se renouveler comme avec le développement des chantiers de rénovation et de réhabilitation, chose beaucoup plus compliquée en Chine où la très grande majorité des infrastructures est soit trop vétuste, soit n’est pas adaptée au volume de la demande.

Affaire à suivre donc…

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